La Boite à Musiques : Julien Dubois

photo : Dupeyron

LA BOITE A MUSIQUES

JULIEN DUBOIS

“Steve Coleman est une de mes influences majeures ”

Le saxophoniste et compositeur Julien Dubois a sorti au mois d’octobre le remarquable deuxième album “Le Soi et l’Autre” (CHOC Jazz Magazine) de son ensemble Le JarDin, totalement remanié. Une excellente occasion pour un blind test ouvert et contrasté.

Julien Dubois est un musicien féru de musique électroacoustique et électronique et un pédagogue renommé. Attaché à son indépendance artistique et à la vie associative, il a fondé avec ses amis musiciens Thomas Julienne et Clément Simon, le collectif “Déluge” qui a publié 16 albums à ce jour. Outre son groupe Le JarDin et diverses participations (avec notamment Sébastien Jarousse ou Gary Brunton), il a créé avec ses camarades de Déluge : “ Orchid”, un ensemble de 19 musiciens dédié à la création et engagé sur la parité. On y trouve entre autres :  Olga Amelchenko, Jeanne Michard, Sébastien Llado ou Maxime Berton.

aux platines Lionel Eskenazi / photo

OLIVIER MESSIAEN

Chant d’Amour #1 “Turangalila Symphonie - Seiji Ozawa, Orchestre de Toronto” (RCA, 1967)

C’est une musique du XXème siècle, ça pourrait bien être du Pierre Boulez, mais en même temps, dans son côté expressif et métronomique, cette musique est connectée à quelque chose de plus classique. Ça doit sûrement être Olivier Messiaen ! Ce qui me plaît dans le développement du discours musical, c’est sa direction narrative qui progresse à chaque instant à travers des changements de rythmes, de timbres et de contrastes. Cette volonté de construire un discours à travers la musique, on la retrouve dans les pionniers de l’électroacoustique comme Pierre Henry ou Pierre Schaeffer que j’ai beaucoup étudiés et qui m’a inspiré dans l’écriture du répertoire du JarDin. La spécificité du JarDin réside à mélanger le background sophistiqué de la musique contemporaine à un groove rythmique imparable porté par la basse électrique et la batterie.

STEVE COLEMAN & FIVE ELEMENTS

Cüd Ba-Rith Redraft “The Ascension To Light” (BMG, 2001)

En parlant de groove basse-batterie, là nous sommes servis ! C’est Steve Coleman bien sûr et le batteur c’est l’incroyable Sean Rickman ! Steve Coleman est une de mes influences majeures, je l’ai découvert adolescent avec l’album “The Tao of Mad Phat”. C’est sa sonorité au saxophone alto, très pleine, droite et timbrée, qui m’a fascinée, ainsi que son articulation ultra précise. J’ai essayé de reproduire ce son sans jamais y arriver complètement et c’est tant mieux ! Il y aussi bien sûr l’influence de sa richesse rythmique très élaborée et avec mes compagnons de jeu : le bassiste Jean-Luc Lehr et le batteur Maxime Zampieri - qui ont joués avec Magic Malik et qui se connaissent parfaitement bien - je suis très bien servi ! Ce qui m’intéresse aussi chez Steve Coleman, c’est sa dimension politique, car il continue avec brio d’affirmer l’identité noire à travers la modernité et l’avant garde de sa musique, en absorbant la musique contemporaine dans son univers à la fois jazz et groovy.

ALBA OBERT

La Terre Est Plate “Kaleidoscope” (Art District Music, 2022)

C’est très intéressant, ça pourrait être Didier Lockwood, mais je ne pense pas que soit lui...Mais c’est Alba, bien sûr ! C’est une musicienne qui a un excellent niveau et qui travaille énormément. On a pu mettre au point nos unissons violon-sax sur tous les thèmes de l’album grâce à son travail et sa ténacité, puis on a bien su gérer les problématiques de justesse ainsi que les techniques d’amplification. Alba, je l’ai découvert sur scène et j’ai très vite su que je voulais travailler avec elle. Il n’y a rien de plus éloigné que le saxophone et le violon et comme le concept de mon album est : “Le Soi et l’Autre”, l’antagonisme de nos deux instruments correspondait très bien à cette idée motrice.

PHONEM - MAÏLYS MARONNE

Down Dog Part.2 “Geometriks” (Onze Heure Onze, 2023)

C’est assez déroutant et surprenant, ça me rappelle un peu Benoît Delbecq….Mais ça ne peut être que Maïlys bien sûr avec son groupe Phonem. J’ai eu envie de l’intégrer au JarDin lorsque je l’ai entendu dans les Fanfares XP de Magic Malik et en écoutant le tout premier album de Phonem qui m’a scotché. C’est une personnalité musicale et artistique très forte et singulière. J’adore ses constructions sonores et sa capacité à créer des climats étranges. Son discours mélodique va toujours là où on ne s’y attend pas et son interprétations des couleurs est très personnelle.

MARIA GRAND & MARTHA SANCHEZ

Amohin “Amohin” (Biophilia Records, 2024)

J’entends un sax ténor très singulier qui détourne un peu l’instrument, il y a un son granuleux avec beaucoup d’air et ça me semble très improvisé. C’est certainement Maria Grand ! Je ne connais pas cet album, mais j’adore Maria ! Je l’ai découvert en écoutant ses deux premiers disques en trio et je l’ai contacté au culot pour qu’elle vienne faire une masterclass avec mes élèves et pour qu’elle vienne en invité sur notre album, où elle joue sur deux morceaux. Elle a une virtuosité et un placement rythmique incroyable, ainsi qu’une connexion très profonde avec le jazz et puis n’oublions pas qu’elle a étudié avec Steve Coleman !

CD : Le JarDin“Le Soi et l’Autre” (Déluge)

CONCERTS :

12 mars 2026 Le JarDin - La Petite Halle (Paris)

13 mars 2026 Le JarDin – Le Taquin (Toulouse)

7 avril 2026 Julien Dubois Quartet - Salle de l’Orangerie (Eaubonne)