La Boîte à Musiques : Mathias Levy

1 sept. 2025

LA BOITE A MUSIQUES

MATHIAS LEVY

“J’ai été nourri par la chanson française

Le violoniste Mathias Levy sort ce mois-ci le très beau et sophistiqué “Chant Song” (CHOC Jazz Magazine) qui le voit prendre un virage dans l’univers de la chanson en compagnie de la chanteuse Lou Tavano. Une excellente occasion de le rencontrer et de lui proposer un blind test avec des violons bien sûr, mais aussi d’autres choses…

aux platines Lionel Eskenazi / photo Marikel Lahana

BELA BARTOK

Allegro non Troppo “Concerto pour Violon & Orchestre n° 2”

(André Gertler : violon, Brno State Philharmonic Orchestra, direction : Janos Ferencsik, Suppraphon, 1965)

C’est Bela Bartok, ça ne peut-être que lui ! Quelle modernité dans l’écriture, j’y entends une conception hyper jazz dans les phrasés et le chromatisme. C’est un compositeur important que j’admire beaucoup et je lui ai consacré un album en trio “Bartok Impressions” en 2018 au Budapest Music Center avec deux musiciens hongrois : le contrebassiste Matyas Szandai et le virtuose du cymbalum Miklos Lukacs. L’idée était surtout de reprendre des compositions tirées de “Mikrokosmos” et des danses folkloriques, mais nous avons tout de même osé transposer un mouvement de son concerto pour orchestre ! Ça a été un terrain de jeu passionnant qui lie à la fois la musique classique et la musique balkanique, tout en restant ouvert sur l’improvisation et le langage du jazz moderne. Ce fût un virage important dans ma carrière.

STEPHANE GRAPPELLI

Manoir de mes Rêves “Notre Ami Django : Hommage de ses Compagnons” (Vega, 1958)

C’est Stéphane Grappelli qui interprète Manoir de mes Rêves ! J’étais trop jeune pour le voir en leader sur scène, mais par contre, gamin, j’ai vu plusieurs fois Didier Lockwood et lors d’une Nuit du Jazz, Didier avait convié Grappelli en tant qu’invité d’honneur et Stéphane m’avait signé un autographe, que malheureusement j’ai perdu ! J’ai beaucoup écouté Grappelli et je me revois encore, adolescent, relever ses solos ! C’est une musique qui me semblait naturelle, comme si je l’avais toujours eu en moi ! En 2011, j’ai reçu le Grand Prix Stéphane Grappelli au festival de Calais organisé par Lockwood. Mon album “Revisiting Grappelli”, enregistré en 2016, a été très important à plus d’un titre car c’est mon premier album avec Sébastien Giniaux et Jean-Philippe Viret qui sont devenus depuis des compagnons de route réguliers. Et puis j’ai eu la chance d’enregistrer cet album sur le violon de Grappelli, un Pierre Hel de 1924, prêté par le Musée de la Cité de la Musique. C’était très stimulant et émouvant de jouer sur ce violon et ça m’a fait comprendre que Stéphane, c’était avant tout un son et un son inégalable !

JEAN-LUC PONTY

Renaissance “Aurora” (Atlantic, 1976)

Je reconnais bien le style de Jean-Luc Ponty, mais ce n’est pas un album que je connais bien, j’ai d’ailleurs envie de m’intéresser un peu plus à cette période Atlantic, car ce sont surtout ses albums des années 60 que j’ai beaucoup écoutés, comme “Jazz Long Playing”, “Live au Caméléon” ou “King Kong”. Ce que j’entends là, c’est hyper maîtrisé avec un très beau travail de composition et d’architecture, mais j’avoue que le jazz-rock ce n’est pas trop mon truc. En mettant Ponty à part bien sûr, je trouve que le jazz-rock sonne trop rude, c’est parfois un peu trop écrasant et imposant, ça manque souvent de fragilité et de lyrisme, j’ai besoin de tendresse dans la musique ! Jean-Luc Ponty, je l’ai rencontré plusieurs fois, il apprécie mon travail et c’est très précieux pour moi d’être adoubé par un tel violoniste !

LOU TAVANO

The Dancer “Uncertain Weather” (L’un L’une, 2020)

C’est Lou Tavano bien sûr, j’adore cette chanson qui a une force incroyable et elle arrive à nous emmener dans son univers avec son grand talent d’interprète. Je l’ai rencontré il y a quelques années et nous avons bien accroché humainement et musicalement. Pendant deux étés, on s’est retrouvé tous les deux à diriger les stages de jazz à Marciac. Quand j’ai eu l’idée de réaliser “Chant Song”, un album que je qualifierai de jazz-folk-vocal, j’ai tout de suite pensé à elle et Lou s’est totalement investie dans le projet où elle joue un rôle clé, en étant constamment devant. J’ai été nourri par la chanson française et j’ai moi-même dans ma jeunesse chanté dans la rue des chansons de Brel ou de Brassens, je tenais donc à ce que Lou chante sur ma musique en français et elle l’a magnifiquement fait !

TRIO VIRET

Saint Awawa “Ivresse” (Mélisse Music, 2019)

Il se trouve que je connais très bien cet album car j’ai assisté à l’enregistrement ! J’apprécie d’ailleurs beaucoup ce morceau et il me semble que Saint Awawa est un bar qui existe en Bretagne. J’aime beaucoup Jean-Philippe Viret, c’est un super musicien et un grand compositeur et lui aussi a besoin de tendresse dans la musique ! Je l’ai rencontré par le biais de son ami d’enfance : Emmanuel Bex (ils étaient à l’école maternelle ensemble !). Je l’ai contacté quand j’ai réalisé “Revisiting Grappelli” car il avait été le contrebassiste de Grappelli et avait donc une grande légitimité pour jouer cette musique, à tel point que je lui ai demandé également d’assurer la direction musicale de l’album.

CD : “Chant Song” (Kom)

CONCERTS :

4 septembre Duc des Lombards (Paris)

15 novembre Crescent (Mâcon)

18 novembre Studio de l’Ermitage (Paris)

30 novembre Salle Prévert (Joinville-le-Pont)